La constitution d’une bonne flore digestive chez le veau nouveau-né est une étape primordiale pour sa bonne santé ainsi que sa croissance. En effet, des troubles digestifs comme les diarrhées néonatales peuvent survenir chez le veau en cas d’altération de sa flore digestive. Il est donc important de mettre en place toutes les mesures nécessaires afin que l’animal se constitue une bonne flore digestive pour toute la durée de sa vie non seulement pour lutter contre de potentielles maladies mais aussi pour optimiser sa croissance.
Composition de la flore digestive du veau
La flore digestive du veau, également appelée microflore digestive ou flore commensale, se met en place très rapidement suite au vêlage. En effet, le tube digestif du veau nouveau-né est stérile à la naissance et il va se retrouver rapidement colonisé par des milliards de bactéries non pathogènes qui vont constituer sa flore pour toute la durée de sa vie. Elles proviennent de l’environnement de l’animal, de la mère mais aussi de l’alimentation. Ces bactéries sont essentielles au veau pour le bon fonctionnement de son système digestif mais aussi pour lui conférer une protection. Il s’agit d’une association symbiotique, c’est-à-dire que ces bactéries vont être nécessaires au bon fonctionnement du tractus digestif et l’organisme de l’animal va leur fournir les éléments nécessaires à leur survie en contrepartie. Les germes non pathogènes vont ainsi vivre au sein du tube digestif du veau sans lui causer de troubles. L’organisme du veau maintien l’équilibre de sa flore digestive grâce à de nombreux mécanismes, un bon fonctionnement de la digestion est un facteur clef. Dès lors qu’un de ces mécanismes est altéré, un déséquilibre de la flore peut survenir. On peut alors voir apparaître des conditions favorables à l’installation et la prolifération de certains germes pathogènes au sein du tube digestif. De plus, la flore digestive se stabilise en 2 à 6 semaines, ce qui explique une plus grande fragilité et sensibilité du système digestif du veau nouveau-né.
Les bactéries les plus majoritairement présentes au sein de la flore digestive du veau sont : Escherichia coli, Lactobacillus, Streptococcus, Clostridium, Bifidobacterium, Fusobacterium, Bacteroïdes et Eubacterium. Elles sont dites autochtones. Chacune se trouve ainsi dans divers segments du tube digestif selon leur affinité (caillette, duodénum, jéjunum, iléon, cæcum et colon). Le microbiote intestinal du veau (ensemble des micro-organismes qui composent la flore) contient également des champignons, protozoaires, virus et archées (anciennement appelées archéobactéries) qui sont également non pathogènes. À noter que chaque flore est unique et propre à un individu.
On distingue la microflore anaérobie facultative (qui peut vivre en présence ou en absence d’oxygène) et aérobie (qui a besoin d’oxygène pour se développer) qui colonisent le tube digestif du veau en premier lieu et qui vont consommer l’oxygène disponible pour laisser place aux bactéries anaérobies strictes (qui se développent en absence d’oxygène). Cette microflore anaérobie sera majoritairement présente par la suite. À partir de ses 15 premiers jours de vie environ, le veau possède globalement la même flore digestive qu’à l’âge adulte.
Quelle est l’importance de la flore digestive du veau ?
La flore digestive du veau ne lui permet pas seulement une bonne digestion des aliments et un apport de nutriments (vitamines, acides aminés, etc.). Elle est également essentielle à la protection du veau contre les germes pathogènes qui pourraient proliférer au sein de son tube digestif. Elle joue alors le rôle d’une barrière aussi bien de manière directe qu’indirecte en stimulant les défenses immunitaires locales. Les diarrhées néonatales d’origine infectieuse (bactérie, virus, parasite) apparaissent le plus souvent suite à un déséquilibre entre la pression microbienne (germes présents dans l’environnement) et les défenses immunitaires du veau (notamment grâce au colostrum) qui sont deux grands facteurs de risque. Ainsi, de nombreux facteurs comme de mauvaises mesures d’hygiène ou encore une mauvaise gestion de la prise colostrale peuvent conduire à une diarrhée chez le veau. C’est cette flore digestive associée à une bonne immunité colostrale qui vont être déterminants dans la protection du veau contre les maladies les plus fréquemment rencontrées, dont les diarrhées néonatales.
En temps normal, il existe un équilibre entre les bénéfices que les bactéries procurent à l’animal (barrière, digestion des nutriments, etc.) et les effets délétères qu’elles peuvent avoir sur le veau (compétition pour les nutriments, sécrétion de substances toxiques, etc.). Mais comme nous l’avons vu précédemment, dès lors qu’un déséquilibre de la flore digestive de l’animal survient, elle ne peut plus assurer correctement ses fonctions, notamment sa fonction de barrière. Certains germes pathogènes peuvent alors proliférer et être responsables de maladies chez le veau. On parle de dysbiose intestinale dès lors que la flore digestive est altérée. Parmi les facteurs pouvant être responsables d’un déséquilibre de la microflore intestinale, on peut citer l’alimentation du veau, l’environnement, l’hygiène, l’administration du colostrum (mauvaise qualité ou quantité), le stress du veau ou encore la génétique. Un déséquilibre de la flore peut ainsi avoir des conséquences sur la santé du veau en le rendant plus fragile face à de potentielles maladies néonatales mais aussi avoir des conséquences sur sa croissance.
Comment prévenir un déséquilibre de la flore digestive du veau ?
Pour prévenir un déséquilibre de la microflore du veau, il est nécessaire de limiter tout facteur pouvant avoir un impact négatif. Ainsi, en tout premier lieu, il est important de distribuer au veau le colostrum de manière optimale pour offrir la meilleure protection possible. Sa qualité (au-delà de 50 g d’anticorps par litre) et sa quantité (administrer 4 à 5 L de colostrum dans les 6 à 12 premières heures de vie) tout comme la précocité d’ingestion (1,5 L à 2 L dans les 2 premières heures de vie) doivent être pris en considération. D’excellentes mesures d’hygiène au moment du vêlage mais aussi dans l’environnement du veau nouveau-né sont fondamentaux pour permettre aux bonnes bactéries de peupler le tube digestif dès sa naissance. Minimiser au maximum le stress du veau est également un point à prendre en considération. Un accès à de l’eau propre tout comme une bonne distribution de l’alimentation lactée sont tout aussi importants. Par ailleurs, la flore digestive du veau dépendant directement du régime alimentaire de l’animal, il est très important de réaliser une transition alimentaire progressive à chaque changement d’aliment pour permettre une modification adaptative de la population microbienne.
Il est à rappeler l’importance de ne pas utiliser des antibiotiques systématiquement en cas de diarrhée chez un veau. En effet, en plus d’avoir potentiellement un impact sur le phénomène d’antibiorésistance, cela pourrait également perturber la flore digestive en agissant contre les bonnes bactéries qui constituent le microbiote intestinal.
Références bibliographiques
– MALLET Romain : ADAPTATION DU TRAITEMENT DES DIARRHEES NEONATALES DU VEAU A L’EVALUATION CLINIQUE ; Vetagrosup, thèse Année 2016 – n°098
– CORNILLE Manon : Performances diagnostiques d’outils pratiques pour l’évaluation de la qualité du colostrum et du transfert d’immunité passive chez les bovins. Thèse d’exercice, Médecine vétérinaire, Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse – ENVT,2015, 128 p.
– INRAE Prod. Anim., 2020, 33 (4), 249-260 : état des lieux de la recherche et impacts des microbiotes sur les performances et la santé des animaux